Le 25 septembre 1923, l’étudiant en botanique Kurt von Riebensturm, de l’université de Heidelberg, consacra plusieurs mois à l’étude de l’Elymus Repens, une herbacée commune plus connue sous le nom de « chien dent. »
Il l’observa longuement, la croqua sous tous les angles, préleva ses graines, étudia sa méthode de reproduction. Il en recensa toutes les variétés existantes dans la région de Heidelberg et parvint à en croiser plusieurs entre elles. Il tenta de les cuisiner de plusieurs façons possibles, de la racine aux graines. Il en fit ces infusions, des décoctions, des teintures, des cataplasmes et des lavements.
Pourtant, jamais il ne découvrit une propriété unique de l’Elymus Repens. Cette herbe si commune est d’une timidité maladive, au point qu’elle refuse de pousser lorsqu’on la regarde. Si on insiste, elle a tendance à tourner le dos à l’observateur, ce que Kurt von Riebensturm interpréta pour de l’héliotropisme. Plus tard encore, l’étudiant établit que la pollinisation de l’Elymus Repens était aléatoire alors que son spécimen d’étude, excédé, cherchait juste à lui cracher au visage. Enfin, si le matériel adéquat avait été disponible à l’époque, il aurait peut-être découvert que l’Elymus Repens l’insultait copieusement dès qu’il entrait dans son laboratoire le matin.
On imagine la révolution qu’auraient connue les sciences naturelles si von Riebensturm avait été un peu plus attentif. Peut-être même lui aurait-on accordé son diplôme, tout compte fait.
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